L’Allemagne, la France et les autres pays fondateurs de la Communauté européenne ont évidemment raison de vouloir une Europe à vingt-cinq efficace et plus forte sur la scène internationale. Or tel était bien l’enjeu du sommet de Bruxelles qui a échoué ce week-end à se mettre d'accord sur le contenu final de la première Constitution européenne. Mais pourquoi les gouvernements de Berlin et Paris ont-ils autant de mal à comprendre qu’ils pêchent par la méthode ? Après avoir tenté d’imposer à l’ensemble de l’Union leur position sur la crise irakienne, puis avoir mis sur la touche le Pacte de stabilité, voilà qu’Allemands et Français ont menacé d’aller de l’avant seuls dans la construction européenne s’ils n’obtenaient pas gain de cause sur la Constitution. Or c’est bien l’hégémonie franco-allemande sur l’Europe à vingt-cinq que refusent l’Espagne et la Pologne quand ces pays exigent un poids équivalent à celui de Berlin, Londres, Paris et Rome lors des votes au Conseil des ministres de l’UE. Après avoir caressé un instant le rêve au printemps dernier de créer l’Europe de la défense sans la Grande-Bretagne, Jacques Chirac et Gerard Schroder envisagent-ils sérieusement de doter le continent d’une Loi fondamentale en méprisant Madrid et Varsovie qui, en demandant par ailleurs que le préambule de la Constitution fasse référence au christianisme, rappelle leurs vieilles racines européennes. La plus parfaite des Constitutions ne fera pas avancer l’Europe si elle n’entraîne pas l’adhésion de tous ses peuples.
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