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Eric, l'ami absent

Eric Eric Venturini était un ami, un frère. Pour moi et pour d'autres. Je désirais évoquer son souvenir, 21 ans après son décès, le 8 février 1990, en vous proposant quelques textes écrits à l'époque en son hommage.

 

 

 

 

La mort d'Eric Venturini, par Vincent Hugeux

Eric Venturini, 30 ans, a été tué jeudi dans un accident de moto alors qu'il se trouvait en compagnie de son ami Marc Tronchot, chef du service politique d'Europe 1, atteint lui d'une fracture ouverte au fémur.

Journaliste indépendant - comme ce titre lui allait bien - et collaborateur de LA CROIX l'Evénement, fils d'une famille d'ouvriers lorrains d'origine italienne, il avait su mener à bien sa maîtrise d'histoire et ses études à l'Ecole supérieure de journalisme de Lille. Puis s'imposer comme l'un des meilleurs spécialistes français de l'Amérique latine.

Grand reporter puis chef du service Société à l'hebdomadaire Révolution, il est congédié en janvier 1987 pour indépendance d'esprit. Co-auteur avec son ami Michael Stührenberg d'Amérique centrale, la cinquième frontière, Eric se consacre à son sujet favori. Journaliste de terrain, au mépris du danger. Salvador, Nicaragua, Pérou, Bolivie, Colombie, Chili : sa finesse, sa culture et son sens de l'humain déjouent les pièges de ces pays "minés". On retrouve sa griffe dans les colonnes du Monde diplomatique, du Soir de Bruxelles, de Témoignage chrétien ou de LA CROIX l'Evénement.

Il signera aussi, avec son ami Dominique Vidal, des Portraits de Chinatown, consacrés à la communauté asiatique de son cher 13e arrondissement.

Ce solitaire, ce pudique, avait beaucoup d'amis vrais.

Vincent Hugueux,  © La Croix l'Evénement 1990

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 Ciao, Eric !, par Dominique Vidal

Il n'est pire injustice que la mort à trente ans. Mais lorsque, de surcroît, c'est un être cher, animé d'une rage de vivre irrésistible, qui nous quitte brusquement, par accident, on a envie de crier - j'ai crié, ce maudit 8 février !

Enfant, Eric Venturini a vaincu le cancer. Adolescent, il a surmonté les difficultés d'un milieu modeste et réussi de brillantes études supérieures. Journaliste communiste, il a su conquérir son indépendance et devenir un spécialiste reconnu, reporter et analyste, de l'Amérique centrale et latine. Sans jamais se renier.

Car sa force vitale, par delà même son engagement, c'était une rare exigence morale. Comme tous ses amis, je garderai surtout - avec le chaud souvenir de tant de journées de bonheur passées ensemble - l'image d'un juste. Fidèle, Eric l'était à ses origines ouvrières et italo-lorraines ; à ses amis et à ses amours ; à ceux avec lesquels il travaillait ; à son idéal. Si un jour la gauche renaît en France, ce sera avec des hommes et des femmes de la trempe d'Eric.

Lorsqu'il eut trente ans, Julien Clerc reçut de Maxime Leforestier une superbe chanson, dont une phrase fascinait Eric - nous en discutions lors de son anniversaire, le 18 janvier dernier - : "Ce qui n'est pas ne sera pas plus tard". Elle vient de prendre un sens terrible, insupportable.

Mais, comme Eric aimait à le dire en patois romagnol : "Ci rivedremmo a la fiera al borgo" (1).

Dominique Vidal, © Témoignage chrétien 1990

(1) Textuellement : "On se reverra à la fête du village". En fait, une manière de se dire au revoir...

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Adieu Eric, par Marc Tronchot

Aula Maxima / Facultés très catholiques / Vauban déménage / Tour de Lille / Une déesse à sa Place / Une Comtesse à l'Hospice / Une Salamandre au Théâtre / Une Furet dans une librairie / Le plat pays qui n'est pas le mien / A louer Rue nationale Imm récent Studio 30m2 kitch bains chauff ind prix int / Les bonnes affaires de La Redoute / Une Renault 6 blanche / Comme la barbe de Maurice / Respectueuses pensées / Machine à écrire obligatoire / Trop de doigts / Trop de touches / Trop de notes / Fastidieux solfège / L'amitié en route / Eric et Alain / Alain et Eric / Parce que c'était eux, parce que c'était moi / Les silences de l'Italien / La générosité du Belge / L'arbitrage de Catherine / Le sourire de Pascale / Picpain, moutarde et Coca-Cola / Sidérurgie et Tiers-Monde / Brest Longwy Bruxelles / La Ducasse : ses bières, sa patronne / C'était bien, c'était chouette et on y retournera / Les calembours de Vincent / Bouetloingeville / Ciseaux de Merlan, Uher et bobino / Un jaune devant, un bleu derrière / Nuits magnétiques à Fréquence-Nord / Brigitte... / La vie, l'amour, la mort / Le Carnaval des Géants / Chicon et flamiche / Tripes volantes à Bailleul / Nuit des longs parapluies à Dunkerque / Chahut / Un pétrolier pour Monsieur Laugier / Supplice du typomètre / Quelle justif ? / Alignement à droite / A gauche / Question de caractère / Conflit Iran-Irak / Enduro du Touquet / Mitterrand Président / Chaud beffroi / Maurice D. et Blaise C. / Balle au centre / T'as voulu voir Vierzon... / Contre-jour de Chambord / Montlouis avant le Big Bang / Aristos troglodytes / Une cave en bord de Loire / Momo chante Marie : Voix du Nord, édition de Tours / Hervé Bourges / Africa sur Deûle / Etienne, Etienne / Gilles le Gabonais / Jacqueline la Béninoise / Eté marseillais / Automne lavallois / Rentrée dans l'atmosphère / Gauthier de Châtillon / Radio-activité / Dominante / Bob, bob, bob, Boulay /Conduite de nuit / Cigares, whisky, sans p'tites pépées / Escapade outre-Quiévrain / De Bruges à Gand / Béguinage et carillon / Gingle / Chapeau / Accroche / Papier / Chute / Brève / Galette / Ad lib / Bourse Lauga / 26 bis / Nous entrerons dans la carrière / Deux si belles années / Adieu Eric...

Marc Tronchot © Tronchot 1990

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Salut, Eric !, par Alain Hertoghe

Cher Ricky,

Putain de mois de février 90 ! Tu casses ta pipe et les sandinistes se cassent la gueule. Toi et eux, vous aviez vécu le plus dur.

Ta mère ne devait pas avoir d'enfant ; le Nicaragua devait rester une république bananière de l'Oncle Sam. Ta naissance fut une divine surprise, comme celle de la révolution rouge et noir. Enfant, tu as surmonté le cancer : chavala, la révolution a vécu le sien, la Contra.

Vous touchiez au port, après avoir tant ramé pour trouver votre place dans ce monde si stupidement hostile aux hommes de principes, aux êtres de conscience, à ceux qui ne peuvent vivre tranquilles devant l'insoutenable indécence de l'ordre des choses.

Je te savais heureux de vivre, le 8 février, lorsque tu as traversé avec Marc le pont Alexandre III ;  je les ai vus euphoriques de survivre, le 21 février, sur la place Carlos Fonseca de Managua, quand ils fêtaient trop tôt leur victoire sur la guerre du beurre et des canons. Elle était dure à souffrir, ton absence, devant cette mer humaine brandissant les drapeaux de la révolution, alors que Carlos Mejia Godoy chantait La Consigna des années de guérilla, qui avait rejoint dans ton coeur Bella Ciao, le chant des partisans antifascistes italiens.

Drôle de rencontre que la nôtre, il y a presque dix ans déjà, à la porte de l'Ecole de journalisme de Lille. Moi, le fils de bourgeois belge, militant sympathique - tu le disais - d'Amnesty International. Toi le fils de sidérurgiste lorrain, d'immigrés italiens, le communiste stalinien - c'est encore toi qui le disais -, qui allait me raconter les muchachos du Nicaragua, puis du Salvador, avec Michael, puis encore dans nos têtes, avec Dominique.

Je n'oublierai jamais ce matin d'hiver, quand tu as débarqué les yeux rougis dans ma chambre d'étudiant, à Lille, alors que tu venais m'apprendre le coup d'Etat de Varsovie. Je sais que la force intacte de ton idéal révolutionnaire, tu la devais aux sandinistes, qui te prouvaient que la révolution ne se termine pas toujours en démocratie populaire, mais peut être démocratique et populaire.

Tu aurais souri devant mon désarroi, aux premières heures du 26 février, quand je n'avais pas encore compris qu'une élection n'annule pas dix ans de révolution, que les muchachos relevaient déjà la tête, préparant un nouveau Triunfo.

Dieu que j'aurais aimé partager avec toi, encore une fois, notre passion de l'analyse, notre indécrottable optimisme. Seul sous le ciel de Managua, je souris à mon tour, t'imaginant à la droite du Père - toi, l'athée endurci - car il n'aura pas pu se priver de ta compagnie...

Alain Hertoghe, © Nicaragua Aujourd'hui 1990

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